Questions de compréhension:
1. D’où ce rat est-il originaire?
2. Relever toutes les appellations des lieux qu’habite le Rat
3. Est-ce que l’huître parle?
4. Relever les vers de discours rapporté.
5. Comment explique-t-on que ce rat n’est pas vraiment savant?

Introduction pour une explication linéaire :

Le philosophe Pascal juge sévèrement l’imagination : «cette partie dominante dans l’homme, cette maîtresse d’erreur et de fausseté...». Le poète La Fontaine, lui, met l’imagination, la fantaisie, la variété, au centre de son esthétique. En effet, loin de la sécheresse du fabuliste grec Esope, dont il reprend souvent les sujets, il développe son récit comme un véritable conte ou une petite comédie. Pour autant, La Fontaine n’ignore pas les dangers d’une imagination ignare et naïve: ainsi, dans «le Rat et l’Huître», publiée en 1678 dans le deuxième recueil, au livre VIII, le Rat succombe à son imagination débridée autant qu’à sa gourmandise, lorsqu’il insère imprudemment la tête dans l’huître, qui se referme. En étudiant la progression de cette fable, observons qu’à chaque étape du récit, l’auteur fait parler son personnage puis commente en moraliste son comportement. Comme dans la morale finale, ne s’agit-il pas à chaque fois de blâmer l’imagination inculte et débridée ? 

Découpage de la fable :

  • v.1-4 : situation initiale et décision du rat de partir
  • v.5-8 : première péripétie, réaction du rat rapportée au style direct, commentaire du narrateur sur son personnage
  • v.9-20 : deuxième péripétie, réaction du rat rapportée au style direct, commentaire du narrateur sur son personnage
  • v.21-33 suite de la 2e péripétie, focalisée sur une belle huître, réaction du rat rapportée au style direct, fin du récit (v.30-33), commentaire du narrateur sur son personnage (v.33)
  • v.34-39 morale(s)

Vocabulairepdf   (cf source supposée de La Fontaine : http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/rathuitr.htm

Conclusion à propos de la moralité de cette fable

Cette fable se termine, comme souvent, par une morale explicite, qui, ici, est assez développée: 6 vers. Toutefois, cette moralité a quelque chose de singulier: après l’avoir introduite comme un bilan «Cette fable contient plus d’un enseignement» (v.34), La Fontaine donne lui-même deux moralités assez disparates. La première n’est pas normative, elle ne dit pas ce qu’il faut faire ou ne pas faire, mais relève de l’observation des comportements: le manque d’expérience nous laisse candide et ingénu. La deuxième est proverbiale et souligne le comique de situation. Du reste, La Fontaine semble laisser entendre que nous pourrions tirer encore d’autres moralités de sa fable. Celle-ci n’a pas été inventée pour illustrer une morale préalable, comme le faisait Esope, mais est elle-même la source, l’occasion de nombreux enseignements. Ainsi, cette fable se termine par une réflexion d’auteur sur le lien entre conte et morale. La Fontaine fait preuve d’un peu de désinvolture dans cette façon un peu bavarde de présenter les morales de sa fable. Est-ce pour nous laisser entendre que le récit vaut davantage qu’une simple illustration argumentative?

Intro. + Découpage + Concl. : pdf

Compléments

  • v.12 ‘crut voir, en les voyant’ : cette polyptote semble être une maladresse de langage que le narrateur attribue au Rat > c’est un procédé par lequel le narrateur se moque de son personnage
  • v.27-29 : le rat ‘fait  des phrases’: c’est un pédant
  • Par ailleurs, cette fable est un récit à chute. 

Questions, vocabulaire, introduction et plan de commentaire composé : pdf (Comment La Fontaine, poète sensible et observateur, met-il l’imagination au service de la vérité?)

Lecture analytique

I - Les personnages bien caractérisés d’un auteur qui sait observer

1. La beauté et le silence de l’huître
- La Fontaine est attentif à la nature en général et réussit à rendre en peu de mots tout un environnement: la plage (v.10) de l’huître, soleil (v.22), vent (zéphyr v.23) [de même pour l’environnement du rat: v.3]
- cependant, c’est en poète que La Fontaine observe la nature: pour donner vie à l’huître silencieuse et qui n’a pas de poumon il la fait ‘humer l’air’, ‘respirer’ (v.24 - métaphore), lui attribue une vie psychologique, des sentiments (‘réjouie’ v.23, ‘épanouie’ v.24); il semble même comparer l’huître à une femme : ‘blanche, grasse’ v.25
- l’huître apparaît donc comme heureuse, silencieuse (elle ne parle pas), belle; par ailleurs, on va voir qu'elle sait se défendre

2. Le rat est tout à l’opposé : sa suffisance et sa bêtise (le silence de l’huître souligne le bavardage du rat)
- son mépris pour sa patrie et son propre père : explicite dans le discours rapporté (v.13-14 ‘mon père était un pauvre sire’); déjà suggéré par le vocabulaire péjoratif avec lequel le narrateur rend compte des sentiments du rat: ‘abandonne son trou’ v.4, ‘la case’ v.5
- le rat se montre pédant: v.15 ‘maritime empire’ (grands mots), fait des phrases v.27-29; son imagination grandiloquente agrandit tout (taupinée > mont, Apennins, Caucase; huîtres > vaisseaux de haut bord); observer le rythme ternaire, dès le v.1, puis v.3 (ainsi que l’ensemble v.3-4)
- le rat est gourmand (cf v.29, v.30 ‘belle espérance’) et impatient (v.5-6 Sitôt que...) et bavar (il parle tout de suite) 

Transition: dans cette fable, le récit semble vouloir courir comme le Rat

II - Un récit alerte, un récit à chute

1. La vivacité du récit 
Plusieurs procédés créent cette vivacité: 
- le passage au présent de narration dès la 2° phrase (v.3) puis le retour au passé simple (v.5) épouse le caractère impatient et virevoltant du Rat
- les verbes introducteurs du discours rapporté au style direct sont tous en incise: enchâssés dans le récit, ils font partie du récit
- enjambements v.9-12 : la phrase court sans se laisser formater par le vers
- accents héroï-comiques (raconter des choses triviales de façon grandiose, épique): allusions mythologiques, vaisseaux de haut bord

2. Un récit à chute (fin inattendue)
- les ‘belles espérances’ (v.30) du rat sont déçues : il meurt subitement. 
- cette fin est inattendue pour le rat jusqu’au v.32
- cependant, cette chute est préparée : l’ironie de l’expression ‘maître Rat’ v.30 nous met sur la piste; les défauts du personnage nous laissent penser que ce dénouement n'est pas injuste; ainsi la chute nous invite à relire ce qui précède: la suffisance ne rend-elle pas imprudent ? 

Transition: que retenir de cette fable variée? 

III  - Une morale ouverte 

1. Une morale multiple (‘plus d’un’ v.34)
- elle est double d’après l’auteur ‘premièrement’ v.35, ‘Et puis’ v.38
- par ailleurs la fin du récit, au v.33, a déjà proposé une morale ‘Et voilà ce que fait l’ignorance’ 

2. Une morale inhabituelle
- déduite a posteriori : elle découle de la fable (ce n’est donc pas la fable qui illustre la morale, comme chez Esope)
- l’auteur prend de la distance avec la morale ‘Cette fable contient...’ v.34 : employer le mot ‘fable’ dans une fable, c’est déjà la commenter
- le ‘Nous’ invite le lecteur à collaborer: nous pourrions trouver d’autres morales ex. la suffisance entraîne la négligence 
- La Fontaine fait preuve d’un peu de désinvolture dans cette façon un peu bavarde de présenter les morales de la fable : puisqu’il faut faire une morale, proposons-en une... 

Pour l’introduction
début du préambule: Esope écrivait de courtes fables en prose, dont le récit ne servait qu’à faire comprendre la morale. La Fontaine, en conteur talentueux, compose des récits vivants et truculents, de véritables petites comédies mises en scène. 

Pour la conclusion: bilan + 
ouverture: Il y a beaucoup d'enseignements à tirer de cette histoire. Outre ceux que La Fontaine indique lui-même, on pourrait aussi observer que, outre l’ignorance, le mépris et l’arrogance du rat le font manquer de prudence: la suffisance mène à la négligence.